[Sobriété foncière] les bailleurs sociaux formulent des propositions concrètes pour produire des logements abordables à partir du bâti ancien déjà existant

Publie le 1 juin 2022

L’acquisition-amélioration est une modalité de production de logement social, mise en oeuvre par les bailleurs sociaux, consistant en l’acquisition d’un bâti ancien, souvent dégradé (logement ou non), immédiatement suivie de travaux de transformation, généralement relativement importants. Cette production de logements à partir d’un bâti existant, sur un foncier donc déjà artificialisé, répond aux enjeux de sobriété foncière auxquels les promoteurs ont l’obligation de répondre dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi Climat et Résilience.

Depuis 2015, en région Hauts-de-France, la production de logements sociaux en acquis-améliorés a fortement chuté de passant de 750 logements en 2015 à 262 logements en 2021.

Pourtant, depuis trois années, un appel à projet porté par la DREAL Hauts-de-France soutient financièrement les opérations d’acquisition-amélioration à hauteur d’une subvention de 10 000€ / logement. Ce dispositif de soutien financier , quoique nécessaire, ne semble donc pas suffisant pour rendre attractif ce mode de production qu’il est demandé par l’Etat aux bailleurs de développer.

Un travail régional Etat-Bailleurs-Collectivités pour identifier les freins et formuler des propositions

Au lendemain de l’adoption de la loi Climat & Résilience, fixant de nouveaux objectifs de réduction de la consommation foncière, le développement de l’offre en acquisition-amélioration peut apparaitre comme la « solution miracle » pour requalifier le parc ancien dégradé, tout en continuant à produire du logement social sur les territoires pour faire face à la demande croissante des ménages.

Afin d’identifier les contraintes et freins à cette production et de formuler des propositions et solutions, la DREAL a initié un travail partenarial en lien avec des représentants des collectivités et des bailleurs sociaux. L’URH a, dans ce cadre, conduit une réflexion avec les bailleurs sociaux de la région, afin de partager les enseignements des pratiques en cours et poser les conditions de développement de cette offre, aujourd’hui insuffisante, en région.

Le fruit de ce travail a été porté à la connaissance des membres du Bureau du CRHH (Comité régional de l’habitat et de l’hébergement) le 17 mai 2022.

De nombreux freins à la production de logements sociaux à partir du bâti existant

Cette analyse régionale a permis de faire émerger le constat suivant :

Une intervention des organismes au gré des opportunités qui ne s’inscrit pas dans une stratégie globale territoriale

– Les opérateurs sont souvent saisis par défaut, lorsque toutes les autres solutions de requalification ont été purgées.

– Des règles de financements (programmation, appel à projets…) annuels, permettant difficilement aux opérateurs de se projeter face à des projets nécessitant parfois plusieurs années de montage.

– Un manque de stratégie globale des collectivités permettant aux organismes de se positionner sur un panel de biens à requalifier.

Des contraintes techniques récurrentes et complexes à traiter :

– Un bâti souvent très dégradé présentant des défaillances parfois structurelles.

– Des mises aux normes difficiles en partant de l’existant (accessibilité PMR, acoustique).

– Présence d’amiante systématique et difficile à anticiper de manière exhaustive dans le cadre des diagnostics.

– Présence de pathologies graves souvent liées à la présence de mérules.

– Contraintes ABF (Architecte et Bâtiments de France) rendant parfois complexes la requalification du bien immobilier en secteur protégé.

– Règles d’urbanismes qui contraignent fortement les interventions (stationnement, intervention en façade… ).

Des opérations chronophages au montage complexe

– Des opérations longues nécessitant une intervention importante de la collectivité (mise en place de procédures juridiques…).

– Des marchés de travaux qui ne ciblent pas les entreprises habituelles du secteur (positionnées sur les appels d’offre volumineux).

– Des opérations nécessitant un investissement très important des équipes de maitrise d’ouvrage (1 logement en acquis-améliorés = 30 logements neufs).

Des équilibres d’opérations souvent impossibles à trouver sans intervention de la collectivité, voire d’autres financeurs

– Des coûts de travaux très élevés nécessitant une intervention financière forte de la collectivité (cession immobilière, subvention…).

– Des surfaces de logements contraintes par l’existant, souvent supérieures aux standards du neuf dont le financement est rendu complexe par l’accessibilité des loyers.

Les propositions concrètes pour favoriser la production en acquis-améliorés

Changer d’échelle en passant d’opérations diffuses à des opérations programmées de requalification dans l’ancien, en accompagnant les collectivités compétentes en matière de lutte contre l’habitat insalubre, dans la mise en œuvre d’opérations à l’échelle d’îlots ou de rues

Encourager les collectivités à être plus « agressives » dans les opérations en quartiers anciens en mobilisant les opérateurs publics (SEM, EPL,…) autour du repérage et de l’acquisition immobilière des biens à requalifier sur les territoires : un accompagnement plus offensif des collectivités dans la mise en œuvre des procédures (préemption, arrêté d’insalubrité …) et la cession directe des biens aux opérateurs à un prix abordable.

Créer de nouveaux dispositifs financiers : dé-conventionnement et re-conventionnement des bâtis dégradés déja propriété des bailleurs (seconde vie des bâtiments), subvention d’équilibre des opérations (avec l’appui des collectivités sur les opérations les plus complexes), …

Prioriser l’acquis-amélioré dans le cadre de « changement d’usage » (« seconde vie » de bâtiment tertiaire notamment), au bénéfice d’un habitat groupé ou collectif et lever les freins à sa production

Autoriser les majorations de loyer (marges locales) sur l’acquisition-amélioration, et élargir le super-bonus aux PLUS et PLS (tous zonages) : l’acquis-amélioré ne doit pas se limiter au PLAI

Sur ce dernier point, l’URH a d’ores et déjà été entendue par Monsieur le Préfet de Région, lors de notre dernière rencontre, à la suite de laquelle le dispositif régional de financement des acquis-améliorés a évolué afin d’élargir le super-bonus Acquis amélioré aux logements financé en PLUS.

Une 1ère avancée très encourageante et un dialogue territorial qui se poursuit dans le cadre des échanges que les bailleurs sociaux entretiennent avec les collectivités et leurs opérateurs sur les territoires.

Contact référent : f.delhaye@union-habitat.org