[DIALOGUE REGIONAL] Rencontre annuelle avec le Préfet de région : des priorités nationales affirmées et entendues mais des « irritants » qui justifient un dialogue continu et soutenu Etat-Bailleurs

Publie le 3 mai 2022

Le Président de l’URH Hauts-de-France, Jean-Louis COTTIGNY, et les trois Vice-présidents, Jean-Pierre CHOEL, Amélie DEBRABANDERE et David QUINT, accompagnés de Sylvie RUIN, directrice régionale, ont été invités, le 15 avril dernier, à un temps d’échanges avec Monsieur le Préfet de Région, Georges-François LECLERC, à l’occasion d’un déjeuner de travail organisé en Préfecture de région.

A l’occasion de ce 1er rendez-vous officiel, depuis sa nomination et le renouvellement des instances de l’URH en décembre dernier, Monsieur le Préfet de Région a réaffirmé des positions fermes sur plusieurs enjeux qui lui apparaissent majeurs pour le logement social dans notre région.

Trois priorités pour l’Etat ont ainsi été confirmées : celle de la production qu’il faut développer, du renouvellement urbain qu’il faut accélérer et de l’investissement sur les logements anciens dégradés (acquisition-amélioration) qu’il faut intensifier. Monsieur le Préfet de région a partagé avec les membres de la délégation régionale son inquiétude que survienne une crise majeure du logement dans notre région au vu de l’évolution forte de la demande et de la difficulté collective à y répondre.

Tout en rassurant sur le total engagement de l’ensemble des bailleurs sociaux pour être au rendez-vous des objectifs nationaux et régionaux affichés, la délégation régionale de l’URH s’est attachée à attirer l’attention du Préfet sur plusieurs difficultés et irritants qui freinent ou sont susceptibles de freiner l’investissement des bailleurs en région : pour certains structurels (raréfaction et prix du foncier, acceptabilité des programmes de logements, inflation …), pour d’autres, nous l’espérons, conjoncturels : hausse des coûts des matériaux, envolée des prix de l’énergie,…

Les trois priorités de l’État au cœur du dialogue ETAT-URH

Produire + sans consommer de terres agricoles et/ou forestières

Alors que la production de logements sociaux se situe actuellement en région autour de 8 500 logements par an, le Préfet de Région a affiché un objectif de progrès : au moins 10 000 logements en 2022 pour un objectif régional d’environ 11 500 logements. Il souhaite que cette intensification de la production respecte l’ambition de ne plus consommer de fonciers agricoles ou forestiers.

Les bailleurs sociaux partagent l’objectif du Zéro Artificialisation net et ont déjà des habitudes de constructions vertueuses.

La délégation, tout en confirmant son adhésion au principe du ZAN, a rappelé que, depuis 10 ans, 2/3 de la production Hlm en Hauts-de-France est déjà réalisée au sein de l’enveloppe urbaine, en renouvellement urbain ou en densification (dents creuses). Les bailleurs sociaux sont plutôt de bons élèves sur le sujet.

Les bailleurs sont forts de l’expérience générée par les importants programmes de rénovation urbaine menés en région dans le cadre du PNRU et du NPNRU (2ème région après l’Ile-de-France concernée par l’ANRU)

Par ailleurs, ils conduisent actuellement plus de 100 opérations dans le cadre du programme Action cœur de Ville (+ de 2 300 logements) positionnant la région Hauts-de-France comme la 1ère région au national sur la mobilisation Hlm dans le cadre du programme Action cœur de ville, (notamment avec des opérations de restructuration, rénovation, démolition reconstruction)

Enfin, dans le cadre du fonds friches, 35 projets permettant le traitement de 210 hectares de friches sont actuellement portés par des bailleurs sociaux.

Pour autant, si des progrès sont à opérer, ils ont exprimé plusieurs pistes pour y parvenir.

7 propositions formulées par le mouvement Hlm  pour favoriser la production en mode « ZAN »

  1. Donner aux bailleurs sociaux une plus grande visibilité du « stock » foncier disponible à vocation habitat (friches, foncier maitrisé par l’EPF ou collectivités)
  2. Rendre les bailleurs sociaux destinataires des AMI (à venir) sur le foncier public en dédiant a minima 30% de celui-ci à la maitrise d’ouvrage directe Hlm, voire 50% sur des territoires déficitaires pour répondre aux enjeux de la politique publique de l’Etat (locatif social ou accession sociale)
  3. Encourager les collectivités à inscrire dans leurs documents d’urbanisme les outils réglementaires qui favorisent la production de logements sociaux (emplacement réservés, servitudes de mixité sociale, …), et à renforcer leurs contractualisations avec les EPF.
  4. Favoriser la mise en place de stratégies foncières intercommunales (en lien avec la mise en œuvre du ZAN) et renforcer le pilotage de leur mise en œuvre dans le cadre des PLH
  5. Pérenniser le fonds friches dans le cadre d’une programmation pluri-annuelle
  6. Encourager la mise en place d’un dialogue renforcé et plus direct entre les EPF et les bailleurs pour proposer des solutions « clé en main » aux collectivités, à l’échelle d’un territoire, sur les fonciers « orphelins » ou repérés par les organismes Hlm dans le cadre de leurs prospections foncières.
  7. Anticiper conjointement les décisions de gel de foncier (dans le cadre de l’élaboration des PLUI et de l’application des plans de prévention des risques notamment)

Développer les opérations en acquisition-amélioration pour rénover l’habitat ancien dégradé

Le Préfet de région a exprimé sa volonté de voir développées les opérations d’acquisition-amélioration de logements anciens dégradés par les bailleurs sociaux dès la programmation 2022.

La délégation régionale de l’URH a reconnu que ces opérations en acquisition-amélioration présentent de réels atouts pour la requalification et la préservation du patrimoine, tout en favorisant la mixité sociale dans le tissu urbain existant.

Toutefois, elle a tenu à illustrer que ces opérations ne sont ni productives (peu de volume), ni financièrement soutenables. Leur montage juridique et financier présente des limites importantes qui ne contribuent pas à en faire un levier de massification de la production: soutenabilité économique et technique, procédures administratives et juridiques longues et complexes, ingénierie mobilisée…

Forte de son analyse produite au sein de l’URH, la délégation a esquissé plusieurs propositions qui seront présentées lors d’un prochain bureau de CRHH.

5 propositions formulées par le mouvement Hlm régional pour favoriser la production en acquis-améliorés :

1. Passer d’opérations diffuses à des opérations programmées de requalification de l’habitat ancien en accompagnant les collectivités, compétentes en matière de lutte contre l’habitat insalubre, dans la mise en œuvre d’opérations à l’échelle d’îlots ou de rues (changement d’échelle)

2. Encourager les collectivités à être plus « agressives » dans les opérations en quartiers anciens en mobilisant les opérateurs publics (SEM, EPL,…) autour du repérage et de l’acquisition immobilière des biens à requalifier sur les territoires : un accompagnement plus offensif des collectivités dans la mise en œuvre des procédures (préemption, arrêté d’insalubrité …) et la cession directe des biens aux opérateurs à un prix abordable (décote type EPF ou baux emphytéotiques ?)

3. Créer de nouveaux dispositifs financiers : déconventionnement et reconventionnement des bâtis dégradés des bailleurs (seconde vie des bâtiments), subvention d’équilibre des opérations (avec l’appui des collectivités sur les opérations les plus complexes)

4. Autoriser les majorations de loyer (marges locales) sur l’acquisition-amélioration et élargir le super-bonus aux PLUS et PLS (tous zonages) : l’acquis-amélioré ne doit pas se limiter au PLAI

5. Prioriser l’acquis-amélioré « changements d’usage » (« seconde vie » de bâtiment tertiaire notamment) au bénéfice d’un habitat groupé ou collectif et lever les freins à sa production avec le recours, le cas échéant, au droit à la dérogation préfectorale.

Parmi les différentes propositions formulées par le mouvement Hlm, le Préfet de région a d’ores et déjà retenu favorablement l’extension de l’aide de l’État aux opérations en PLUS (le dispositif initial prévoyant uniquement le financement des opérations en PLAI).

Accélérer la mise en œuvre opérationnelle des projets ANRU

Les bailleurs sociaux sont très fortement mobilisés dans le cadre des projets de renouvellement urbains conduits en région Hauts-de-France : 57 sites sont concernés sur les 5 départements.

Suite aux alertes de l’ANRU sur l’avancée opérationnelle du NPNRU sur les territoires, le Préfet de Région a rappelé à la délégation régionale plusieurs objectifs à court terme :

– Accélérer la contractualisation des opérations

– Accélérer l’identification des sites de reconstruction de l’offre

– Accélérer l’engagement financier des opérations

Au delà d’un suivi accru des engagements des bailleurs sur chacun des projets, le Préfet a annoncé l’organisation de rencontres bilatérales avec les bailleurs durant ces prochaines semaines.

La délégation a confirmé l’engagement des bailleurs sur cet enjeu important pour eux tout en alertant sur la difficulté persistance sur certains sites à mobiliser les fonciers permettant de développer l’offre reconstruite.

La crise des matériaux : un nouveau frein ?

Enfin la délégation régionale a confirmé que tous les bailleurs sont désormais impactés par des variations importantes des prix de leurs marchés, liées à l’évolution des prix des matériaux, soit en phase de consultation, soit en phase de chantiers.

Si les organismes Hlm ne sont pas réglementairement assujettis à l’obligation d’intégrer des clauses de révision de prix, et à fortiori d’indexation, ils restent néanmoins dans une posture de dialogue et de soutien des entreprises : les solutions apportées le sont au cas par cas, et localement.

Certains bailleurs ont signé le Pacte pour la relance et la charte d’Engagements de bonnes pratiques relatifs à la flambée des couts des matériaux et matières premières. L’URH participe activement aux échanges régionaux et départementaux organisés dans les départements à l’initiative de l’État ou des FFB.

Enfin, le Préfet de région a été très attentif au souhait de la délégation régionale de vouloir maintenir un dialogue continu avec lui, dans cette situation très particulière de crise, pour être en mesure de l’informer, en forte réactivité, des conditions de mise en œuvre des politiques publiques que les bailleurs ont la responsabilité de conduire sur les territoires et dont il doit assurer le reporting auprès de ses autorités nationales.

Un regret exprimé à l’issue de cette 1ère rencontre : celui de n’avoir pu aborder avec le Préfet le colossal sujet de la transition énergétique et environnementale du parc Hlm qui représente, particulièrement dans notre région, un autre défi économique et social majeur dans le cadre de la trajectoire Bas Carbone 2050.

Ce sujet ne manquera pas d’être au cœur de prochains échanges.